• HISTOIRE DE LA GUINEE BISSAU


    Empire du Ghana du XIe au XIIIe siècle

     


    Empire du Mali du XIII au XVIIe siècle

     


     


     

     



    L'histoire de la Guinée-Bissau ne remonte pas aux quelques années qui ont secoué cette petite république africaine depuis environ une décennie. Les troubles qui sont terminés - apparemment - avec l'élection en 2005 de Nino ne doivent pas occulter le passé si riche de la Guinée.
    La Guinée-Bissau n'a été "découverte" par les Européens que moins de 50 ans avant que Christophe Colomb ne foule le continent américain. En effet, 1446 marque le début de l'établissement portugais sur les côtes bissau-guinéennes mais également le début d'une résistance à l'envahisseur des populations locales qui allait durer jusqu'au 20ème siècle. En effet, le premier navigateur portugais Nuno Tristão est tué en 1446 et le dernier portugais avant la guerre de libération sera tué en 1939 par les guerriers Bijagos. Le premier comptoir sera Bolama, situé sur l'île du même nom, en face de l'actuelle Bissau au cœur de l'Empire du Gabù. Le commerce peut alors commencer  : or, ivoire, poivre... et esclaves.

    L'histoire coloniale :

    Au XIIIème siècle, les peuples Nalu et Landuma s'installent dans la région à la faveur du déclin de l'Empire du Ghana. C'est seulement au XIVe siècle, en 1446, alors que la région est en passe d'être intégrée au vaste Empire du Mali (qui comprend les actuels Sénégal, Guinée, Gambie et Mali,...) que les premiers navigateurs portugais établissent des contacts.

    L'histoire coloniale commence, comme partout dans le monde, par l'établissement de quelques comptoirs commerciaux qui permettront aux Portugais d'acheter des esclaves ou de l'or. La richesse et le potentiel de la Guinée-Bissau la feront se faire disputer également par les Français, les Hollandais et les Anglais.

    En 1588, les Portugais fondent Cacheu, dans l'estuaire du Rio Cacheu, qui devient ainsi la première implantation portugaise dans la région qui sera dès lors dirigée par des gouverneurs directement nommés par le roi du Portugal sous la juridiction du Cap Vert. La deuxième grande implantation coloniale sera Gêba, bien à l'intérieur des terres (à une quinzaine de kilomètres de Bafatá).

    Dès le milieu du XVIIe siècle, les Portugais accélérent la cadence coloniale : en 1642, ils fondent Farim et Ziguinchor (aujourd'hui au Sénégal) en déplaçant des familles de colons depuis la ville de Gêba. C'est à la même époque que les estuaires du Rio Buba, du Rio Cacheu, du Rio Gêba et du fleuve Casamance commencent réellement à être fréquentés en vue d'échanges commerciaux et de colonisation de masse.

    Entre 1753 et 1775, la construction de la forteresse de Bissau s'effectue grace au travail de Capverdiens spécialement déplacés pour ces travaux. En 1800, l'Angleterre commence à faire sentir son influence en Guinée Bissau en revendiquant la tutelle de l'île de Bolama, de l'archipel des Bijagos, de Buba et de tout le littoral Sud.

    A la  fin du 19ème siècle, l'abolition de l'esclavage est imposée par les patrouilles de surveillance de la marine britannique. Ainsi, l'exportation des produits agricoles vers l'Europe devint l'activité principale des puissances coloniales en Afrique occidentale. Le Portugal n'étant pas un pays riche et n'ayant que peu de ressources, il ne pût développer ses colonies. Le gouvernement portugais était si faible qu'il permit aux compagnies européennes de contrôler et d'exporter les richesses de la Guinée, principalement l'arachide et l'huile de palme.

    En 1870, grace à l'arbitrage du président américain Grant, l'Angleterre renonce à ses revendications en Guinée-Bissau. Malgré ce partage effectif du pays par les puissances coloniales, les royaumes locaux continuent à résister à toute tentative de colonisation et d'expropriation. Les Floups, une des communautés Diola les plus puissantes et présente principalement vers Oussouye en Casamance sénégalaise, mènent contre les Portugais la bataille de Djufunco en 1879. Cette bataille se soldera par la plus grande déroute portugaise de l'histoire coloniale. Cette résistance sévère des Diolas mènera le Portugal à accentuer sa pression sur le pays en lui donnant plus de prérogatives : la Guinée est séparée de la Province du Cap Vert et la nouvelle Province de Guinée Portugaise qui aura comme capitale Bolama.

    Commencent alors l'occupation militaire du pays par l'armée portugaise et les actions punitives contre les guerriers Pepels de Bissau et du Biombo (1882-1884), contre les Balantes à Nhacra (1882-1884), contre les Manjaks à Caió (1883) et contre les Beafadas à Djabadá (1882). L'adage "diviser pour mieux règner" fait alors le bonheur du colon portugais qui utilise à bon escient les antagonismes ethniques en armant les communautés ethniques les unes contre les autres comme en 1881-1882 où les Peuls Noirs (musulmans) sont armés contre les Peulhs Rouges (animistes).

    Malgré tout, la tension militaire et la rebellion permanente font que le pouvoir colonial portugais se limite aux villes-forteresses occupées par l'admnistration et l'armée : Bissau, Bolama, Cacheu Farim et Gêba. Cette insécurité n'empêche pas la mise en production agricole des terres littorales par les colons portugais ou du monde lusophone (notamment des Caverdiens).

    C'est seulement en mai 1886 que les frontières de la Guinée-Bissau sont fixées en accord avec la France qui possède le Sénégal et la Guinée Conakry. La Casamance passe alors sous domination française en échange de la région de Cacine qui passe sous contrôle portugais.

    Mais la rebellion reprend de plus belle dès la fin du XIXe siècle avec une vague insurrectionnelle dans l'Oio (en 1897 et 1902), dans le pays Floup (encore...) en 1905 et à Bissau en 1908 qui voit l'alliance des Pepels et des Balantes de Cuméré pour une offensive meurtrière. Entre 1910 et 1925, une période de conflit permanent alternant des insurrections autochtones et la répression coloniale sera appelée "la guerre de pacification". Il s'agissait plutôt en guise de pacification d'assassiner les chefs locaux les plus rétifs tout en accentuant l'impôt sur les populations locales. Entre victoires et déroutes des populations insoumises, deux noms resteront dans l'histoire de la répression sanglante : le premier fut João Teixeira Pinto, militaire à la longue expérience coloniale et qui entre 1913 et 1915 lança des actions sanguinaires qui virent le massacre des populations locales durant la campagne de l'Oio (pays balante). Le second fut Abdul Indjai (Abdoul Ndiaye), un Wolof sénégalais (les Wolofs furent les plus grands vendeurs d'esclaves dans cette partie de l'Afrique). Abdul Indjai qui fut l'auxiliaire cruel de Teixeira Pinto dans la bataille de Canchungo, finit par se rebeller et fût arrêté à Mansabá en 1919 avant d'être déporté vers le Cap Vert et plus tard à Madeire (peut-on faire confiance à un Sénégalais ?). A leur tour, les Bijagos se révoltent entre 1917 et 1925 harcelant l'armée portugaise dans tout l'archipel et jusqu'à Bolama. En 1918, les Bayots et les Floups (encore des Diolas) entament une nouvelle guerilla meurtrière contre le Portugal. C'est à cette période qu'une nouvelle administration légiférant la ségrégation colonialiste est mise en place en Guinée-Bissau. Elle formalise :

    - la division de la population entre "civilisés" et "indigènes"
    - la légalisation du recrutement sous le régime du travail obligatoire
    - l'imposition du lieu de résidence et ainsi la limitation de la circulation des "non civilisés" en dehors de leur village
    - le type de relations entre l'administration coloniale, les auxiliaires indigènes et les autorités coutumières (rois locaux, chefs de village, etc...)

    En 1921, à la prise de fonction du gouverneur Jorge Velez Caroço, de nouvelles alliances verront les musulmans - et notamment les Peulhs, être privilégiés par le pouvoir colonial au détriment des communautés animistes mal organisées.

    Entre 1925 et 1940, ce sont à nouveau les Pepels de Bissau qui se révoltent, suivis en 1933 par les Floups de Jufunco qui font du pays Diola (extrême Nord-Ouest) une région toujours incontrôlée. Les Bijagos de l'île de Canhabaque (île Roxa) suivent le mouvement de révolte en 1935-36 et refusent de payer l'impôt au pouvoir colonial. Malgré cette insurrection quasi-généralisée, l'administration coloniale lance la construction d'infrastructures : routes, ponts et élargissement du réseau électrique, etc... La principale culture d'exportation, l'arachide, est également développée.

    C'est également à cette époque que les grande entreprises de capital portugais viennent se créer ou s'implanter en Guinée portugaise. C'est le cas de l'Estrela de Farim et de la Casa Gouveia qui commercialisent l'arachide et gèrent la distribution de produits dans tout le territoire. Dans le même temps, de grandes exploitations agricoles sont également développées dans les rares régions pacifiées : le long du Rio Grande de Buba, autour de Bissau et dans le pays peulh (Bafatá et Gabú). Cet essor économique portugais est favorisé par le coup d'état de Lisbonne en 1926 : le dictateur Salazar prit le pouvoir et imposa des droits de douane restrictifs aux compagnies étrangères présentes en Guinée, les forçant à se vendre aux intérêts portugais.

    L'organisation sociale coloniale pyramidale en ce milieu de XXème siècle trouve en son sommet une poignée de dirigeants et de cadres techniques portugais. Le niveau intermédiaire est composé de fonctionnaires, majoritairement capverdiens (75% !). Cette communauté capverdienne domine également le secteur commercial. Le niveau social le plus défavorisé est évidemment composé des natifs bissau-guinéens qui occupent des fonctions de domestiques, d'artisans et d'agriculteurs.

    En 1942, Bissau qui était déjà de facto la capitale économique et la plus grande "ville" du pays devient la capitale administrative de la Guinée portugaise aux dépens de Bolama.

    En 1950, sur les 512.255 habitants de Guinée portugaise, seuls 8320 étaient considérés comme "civilisés" (dont 2273 blancs, 4568 métis, 1478 noirs et 11 indiens). Sur ces 8320 civilisés, 3824 étaient analphabètes (541 blancs, 2311 métis et 772 noirs). En 1959, à la veille de la vague d'indépendances africaines, seuls 3525 élèves fréquentaient l'enseignement primaire et 249 le lycée Honório Barreto (créé l'année précédente). L'école Industrielle et Commerciale de Bissau accueillait quant à elle 1051 élèves. Le Portugal aborde donc les années 50 avec un bilan désastreux : les provinces de Guinée portugaise sont toujours insoumises, le pays n'a que peu d'infrastructures et les systèmes scolaires et sanitaires sont quasi-inexistants.

    Liste des gouverneurs de la Guinée-Bissau

    & Bowman, Joye, 1997, Ominous Transition: Commerce and Colonial Expansion in the Senegambia and Guinea, Aldershot, Avebury


     

     


     


     

     



     



    HISTOIRE DU PORTUGAL ET DE SON EMPIRE COLONIAL
    de OLIVEIRA MARQUES

     


    La lutte pour l'Indépendance :

    De la fin des années 50 jusqu'au début des années soixante beaucoup de pays en Afrique accédaient à l'indépendance. Mais le Portugal refuse d'abandonner ses colonies. Les Portugais se sont rendus compte que si elles étaient libérées, le néo-colonialisme de Salazar ne pourrait pas être imposé. Ainsi, alors que d'autres pays devenaient libres, l'emprise sur la Guinée s'affermit. Le résultat fût la plus longue guerre de libération que connut l'Afrique : une guerre de "guerilleros" menée par le PAICG avec l'aide significative d'Union Soviétique et du Cuba.

    Dans les années 50, alors que le pays ne s'était jamais vraiment soumis à l'occupant portugais et que plusieurs régions africaines s'émancipent, les idées indépendantistes commencent à germer et mènent à la création en 1956 du Parti Africain pour l'Indépendance de la Guinée et du Cap Vert (PAIGC) dont le fondateur n'est autre qu'Amilcar Cabral.

    La fin de la décennie marquera le début de la fin pour le Portugal en raison d'un évènement aujourd'hui entré dans l'histoire de la Guinée-Bissau. Le 3 août 1959, la grève des marins et dockers du port de Bissau est violemment réprimée par l'armée portugaise : plus de 50 morts seront à déplorer et cette journée restera dans l'histoire comme le "massacre de Pidjiguiti". C'est l'étincelle qui fera prendre au PAIGC la voie de la lutte armée et le chemin de la guerre d'indépendance.

    Quatre années seront nécessaires au PAIGC pour s'organiser et s'armer. Cette guerre de libération commencera vraiment en 1963 et grâce à des actions de guerilla permettra à l'armée de libération d'occuper 5 ans plus tard, en 1968, plus de deux tiers du territoire.

    Désormais politiquement et militairement bien organisé, le PAIGC réussit rapidement à s'attirer la sympathie et la bienveillance de plusieurs nations du monde telles que la Suisse, l'Union Soviétique, la Chine et de nombreux pays du tiers-monde dont le Maroc et la Guinée Conakry. Le monde intellectuel, diverses forces sociales et politiques ainsi que la jeunesse des pays d'Europe occidentale et des Etats-Unis soutiennent ce mouvement d'émancipation et lui permettent d'obtenir en plus des appuis matériels et logistiques une tribune pour exprimer les doléances du peuple bissau-guinéen : Amilcar Cabral pourra s'exprimer à l'ONU et ira même jusqu'à être reçu par le pape Paul VI au Vatican en compagnie des leaders des autres mouvements de libération du monde lusophone (FRELIMO du Mozambique, MPLA d'Angola).


    Voir la déclaration d'Oussouye (Casamance) du Président de la République Sénégalaise, Léopold Sédar Senghor durant la Guerre d'Indépendance de Guinée-Bissau.


    Conscient de la rapide déroute portugaise, le gouverneur, le Général António de Spínola (1968-73), s'essaye à une stratégie de division entre le PAIGC et les populations locale en arguant du fait avéré que les cadres du PAIGC étaient pour la plupart des métis capverdiens, Amilcar Cabral le premier. Son programme “Por uma Guiné Melhor” (Pour une Guinée Meilleure) est censé offrir plus d'équité et de justice à ceux qui, il y a si peu de temps, faisaient partie, pour l'administration, des "non civilisés".

    Ce programme "Pour une Guinée Meilleure" reposait sur :

    1) le parti fasciste União Nacional (illustration à droite : le logo du parti)
    2) la petite bourgeoisie locale indispensable pour ses compétences administratives et ses liens avec le Portugal
    3) la promotion accélérée d'une nouvelle petite bourgeoisie composée uniquement de "vrais fils du pays" promus socialement dans l'administration, dans la hiérarchie des troupes d'élite et, qui bénéficiant d'une telle situation, sur lesquels on pourrait un jour compter.
    4) l'encouragement d'une rivalité entre ces deux bourgeoisies, laissant aux Portugais le soins de jouer les justes arbitres
    5) le jeu de la carte ethnique basé sur le pouvoir traditionnel valorisé avec la création des "assemblées du peuple" (chaque communauté ethnique avait son assemblée) : les rivalités entre les différentes assemblées focalisaient les rancoeurs en faisant oublier pour un temps que l'occupant portugais était à la base du problème. Le recrutement militaire permettait également la division du pays grâce à un recrutement ethnique attirant sur l'éthnie recrutée la haine des ethnies maintenues en dehors de l'armée d'occupation.



    Un autre aspect important du programme "Pour une Guinée Meilleure" reposait sur une propagande aggressive et omniprésente :

    - implication directe des militaires, base du véritable pouvoir colonial, dans la propagande en vue de diminuer l'influence du PAIGC. Pour s'attirer la sympathie du peuple, l'armée ira jusqu'à prêter ses camions pour le transport de matérieux de construction des habitations dans les villages !
    - augmentation du nombre d'enseignants dans le primaire (les zones contrôlées par le PAIGC avaient créé leur propre système scolaire)
    - amélioration du système de santé par la construction de dispensaires
    - promotion des populations locales dans le sport et notamment dans les équipes de football
    - développement et utilisation intensive des médias : journaux télévisés, radio, programmes culturels, temps d'antennes en langues locales offerts aux différentes communautés ethniques
    - diffusion à grande échelle de prospectus de propagande
    - déplacement en personne du gouverneur Spínola (qui deviendra en 1974 le président du Portugal) arrivant du ciel en hélicoptère pour palabrer, entouré d'enfants, avec la population et écouter leurs doléances (manque de riz ou d'écoles).

    La carotte n'était bien sûr qu'une partie de la politique du gouverneur. Le bâton avait plus que jamais sa place : ceux qui n'étaient pas "du bon côté" étaient châtiés sans pitié (nombreuses excécutions arbitraires).

    Malgré toute cette énergie dévouée au programme "Pour une Guinée Meilleure", cette opération était morte-née. L'indépendance était inéluctable en dépit de l'aveuglement du Portugal qui pensera règler le problème d'une manière pour le moins expéditive : il fera assassiné le 20 janvier 1973, à Conakry, Amilcar Cabral, leader du PAIGC, par petit commando armé. Cet évènement, au lieu de retarder la conclusion du conflit ne fit que la précipiter. En mars de cette même année, le premier avion de combat Fiat G-91 est abattu par un missile sol-air Strella. En représailles de l'assassinat d'Amilcar Cabral, une opération militaire d'envergure portant le nom du défunt leader est en outre lancée dans le quart sud-ouest du pays pour prendre la place forte de Guiledje, entre Quebo et Cacine, précipitant la fin de la présence portugaise en Guinée. Le 22 mai 1973, le Sud-Ouest de la Guinée est conquis et occupé par le PAIGC.

    Quatre plus tard, le 24 septembre 1973, la première Assemblée Nationale Populaire est convoquée pour déclarer l'indépendance et la création de l'état souverain de la République de Guinée-Bissau. Ce nouvel état est immédiatement reconnu par 63 pays de la communauté internationale et rentre à l'ONU. Luís Cabral, demi-frère d'Amilcar est alors élu premier Président de la République. C'est à 5000 kilomètres de la Guinée-Bissau que se scellera la dernière étape du processus menant le pays mais aussi les autres colonies portugaises à l'indépendance totale : le 25 avril 1974, les militaires portugais conscient du désastre militaire et de la nécessité de mettre fin à l'empire colonial déclenchent la "Révolution des Oeillets" qui met fin à 48 années de dictature. Les forces d'occupation sont immédiatement retirées de Guinée-Bissau.

    L'indépendance :

    Dès l'indépendance, le nouveau gouvernement du PAIGC connut  de nombreux problèmes. Les Portugais n'avaient en effet vu dans la Guinée qu'un grenier à arachides et à huile de palme. A l'inverse des colonies françaises et anglaises, aucune véritable infrastructure n'avait jamais été construite. Que restait-il de ces 500 ans de colonisation ? Une brasserie destinée à fournir la bière aux troupes portugaises,  quelques petites usines pour le décorticage du riz et de l'arachide, 14 diplômés d'Université, et pas un seul docteur ! Un analphabétisme touchant 95% de la population,  une espérance de vie de 35 ans et 45% des enfants morts avant l'âge de cinq ans.

    Les premières années d'indépendance sont marquées par un gouvernement dirigé par un "parti-état" comme dans la plupart des nouvelles républiques communistes. Les structures administratives restent cependant calquées sur le modèle colonial. Le PAIGC omniprésent dans l'appareil d'état peut alors imposer un dirigisme sans faille et un système autoritaire.

    Le 14 novembre 1980, le Président Luís Cabral voulant unifier le Cap Vert et la Guinée-Bissau est renversé par un coup d'état. Ce push, commandité par le premier ministre en fonction Nino Vieira, brise l'unité Guinée-Bissau/Cap Vert qui avait mené les deux entités à l'indépendance. Une période de purge commence alors. Dissidents et opposants en feront les frais.

    Durant des années, la Guinée Bissau a suivi la voie africaine du Marxisme Léninisme, c'est à dire "rien au peuple et tout au gouvernement". Un pouvoir familial s'est instauré et le pays s'est fermé au monde. Rares sont donc les étrangers qui connurent la Guinée-Bissau avant le début des années 90. Les rares entreprises étaient bien-sûr dirigées par l'État. Les conditions économiques étaient si mauvaises que trouver de la nourriture était presque une activité clandestine; les ménagères pouvaient passer  quatre ou cinq heures par jour à chercher les denrées nécessaires.

    Le processus "d'ajustement structurel" imposé par la Banque Mondiale et qui fera le malheur de nombreux pays pauvres est introduit en Guinée-Bissau en 1985 pour mener à de nombreuses réformes économiques et en particulier à la libéralisation de ce secteur. Cette libéralisation économique sera suivie six ans plus tard, en 1991, par la libéralisation politique avec le fin du PAIGC parti unique.

    La fin des années 90 est marquée par l'ouverture progressive du pays. La situation économique n'a cependant jamais été aussi mauvaise qu'à cette période : toutes les infrastructures tombent en ruine y compris à Bissau : eau courante disponible deux heures par jour, en même temps que l'électricité et services publics en faillite. L'inflation permanente du pesos bissau-guinéen rend les achats de produits aventureux : les prix augmentent chaque jour et la plus grosse coupure, 10.000 pesos, ne permet rien d'acheter si bien que les billets sont agrafés par liasses de 10...

    Pour remédier à cela, la Guinée-Bissau choisit en 1998 de passer au franc CFA, monnaie partagée par la plupart des pays francophones d'Afrique et qui est protégée par la Banque de France. Cette transition monétaire sera l'une des causes d'une période tourmentée qui allait durer près de 10 ans pour ne se terminer qu'en 2004 : lors du passage au CFA, les Bissau-Guinéens ont été invités à changer tous leurs pesos contre la nouvelle monnaie. Si ce changement stoppa l'inflation elle provoqua une brusque et importante augmentation des prix qui priva la population urbaine des produits alimentaires les plus nécessaires. La colère de la population procura à l'armée, dirigée par un héros de la guerre d'indépendance, le général Ansumane Mané, une raison et une occasion de se soulever tout en ayant un grand soutien populaire. Ecarté de l'armée par le président Vieira quelques jours auparavent au prétexte de soutenir la rébellion en Casamance (Sénégal), Ansumane Mané déclencha une insurrection en formant une junte militaire.

    C'est le début d'une période instable qui va durer plus de six années durant lesquels coups d'état et gouvernements transitoires vont se succèder.

    VOIR LA PAGE SUR LA GUERRE EN GUINEE-BISSAU

    C'est l'année 2004 qui a marqué le retour de la paix dans le pays. Des élections parlementaires ont consacré le retour au pouvoir du PAIGC. Il n'en fallait pas plus pour préparer le terrain à Nino Vieira qui a remporté les élections présidentielles de 2005 : après sept ans d'exil au Portugal, Nino a retrouvé son siège de président de la République de Guinée-Bissau le 1er octobre 2005.

    LES CHEFS D'ETAT DE LA GUINEE-BISSAU (depuis l'indépendance) :

    PériodeChef de l'étatFonction
    24/09/73 - 14/11/80 Luís de Almeida Cabral Président du conseil d'état
    14/11/80 - 14/05/84 João Bernardo Vieira Président du conseil de la Révoltion
    14/05/84 - 16/05/84 Carmen Pereira Président de l'assemblée populaire nationale
    16/05/84 - 29/09/94 João Bernardo Vieira Président du conseil d'état
    29/09/94 - 07/05/99 João Bernardo Vieira Président
    07/05/99 - 14/05/99 Ansumane Mané Commandant de la junte militaire
    14/05/99 - 17/02/00 Malam Bacai Sanhá Président par intérim
    17/02/00 - 14/09/03 Kumba Ialá Président
    14/09/03 - 28/09/03 Veríssimo Correia Seabra Président par intérim
    28/09/03 - 01/10/05 Henrique Rosa Président par intérim
    Depuis le 01/10/05 João Bernardo Vieira Président


    GÉOGRAPHIE

    Le nom conventionnel du pays est "République de Guinée-Bissau" en Français et "Republica da Guine-Bissau" dans la langue officielle.
    Guinée-Bissau (Guine-Bissau en Portugais) est le diminutif généralement utilisé. Sur place où l'on ne peut pas la confondre, on l'appelle tout simplement "Guinée" en disant "Guinée Conakry" lorsque l'on veut parler de la République de Guinée frontalière au Sud.

    Devise du pays :
    Unitade - Luta -Progresso
    (Unité, Lutte et Progrès)

    L'HYMNE NATIONAL

    La Guinée-Bissau existe officiellement depuis le 24 septembre 1973. Le 24 septembre est devenu le jour de la fête nationale de l'Indépendance.

    Le drapeau reprend les couleurs du panafricanisme avec une signification particulière pour chacune :
    Le rouge pour le sang versé par les combattants de la liberté dans les jungles de Guinée.
    Le vert pour la vie future, la végétation et l'espérance dans la lutte.
    Le jaune pour l'or aussi précieux que l'unité des Guinéens et des Africains.
    Les cinq branches de l'étoile représentent les cinq sens de l'homme: la vue, l'ouïe, le goût, l'odorat et le toucher.

    Langue officielle : Portugais. Le créole portugais (kriolo) est la langue néanmoins la plus parlée. Dans les villages on parle la langue de son ethnie.


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    Coordonnées géographiques : 12 00 Nord, 15 00 Ouest Superficie : 36 120km²
    Côtes : 350km au total sur l'Océan Atlantique Frontières : 724km dont 386km avec la Guinée et 338km avec le Sénégal
    Territoire maritime : jusqu'à 12 miles marins et zones économique exclusive jusqu'à 200 miles marins Fuseau horaire : UTC 0 (2h de décallage avec la France en été, 1h en hiver)
    Point culmimant : dans l'Est du pays à 300m d'altitude Monnaie : franc CFA (XOF)
     

    DEMOGRAPHIE

    La population de la Guinée-Bissau s'élève à 1 442 029 habitants (estimation juillet 2006). Sa population est très jeune avec 41.4% d'enfants de 0 à 14 ans (297 623 garçons / 298 942 filles), 55,6% d'adultes de 15 à 64 ans (384 559 hommes / 417 811 femmes) et 3% seulements "d'anciens" de plus de 65 ans (18 048 hommes / 25 046 femmes). L'âge moyen des Bissau-Guinéens est de 19 ans seulement et la tendance est encore au rajeunissement avec un taux d'accroissement de 2,07%, un taux de natalité de 37,22/1000 et un taux de mortalité à la baisse (16,53/1000).

    Autres chiffres statistiques (estimations 2006):

    Taux d'immigration : 0/1000 (solde négatif)

    Ratio sexuel à la naissance : 1,03 garçon pour 1 filles
    Ratio sexuel des enfants de moins de 15 ans : 1 garçon pour 1 fille (parité parfaite)
    Ratio sexuel des adultes de 15 à 64 ans : 0,92 homme pour 1 femme
    Ratio sexuel des adultes de plus de 65 ans : 0,72 hommes pour 1 femmes
    Ratio sexuel total : 0,94 hommes pour 1 femme

    Taux de mortalité infantile : 105.21 enfants sur 1000 meurent avant l'âge de 5 ans.
    Espérance de vie à la naissance : 46,87 ans (45,05 ans pour les hommes et 48,75 ans pour les femmes)
    Taux de fertilité : 4,86 enfants par femmes

    Taux d'alphabétisation (adultes > à 15 ans sachant lire et écrire) : 42.4% (hommes : 58.1%, femmes : 27.4%)

    C'est bien-sûr autour de Bissau mais également au Nord-Ouest de la Guinée-Bissau (en pays Diola et Manjak) que la densité de population est la plus forte bien qu'elle demeure à un niveau très faible. Même dans les zones à forte concentration humaine, on peut facilement parcourir des kilomètres dans la forêt sans voir personne. Dans l'Est et le Sud c'est le vide ! La région de forêt pluviale de Catió (une des plus arrosées au monde) est constituée d'un entrelacement de forêt primaire et de mangrove qui rend la vie en saison "humide" relativement difficile même si là-bas plus qu'ailleurs la nature est très généreuse. Entre juillet et septembre il pleut quasiment quotidiennement et de fin mai à début novembre au moins deux à trois fois par semaine !

     Ethnies: plus d'une vingtaine d'ethnies noires, peu d'Européens et beaucoup de métis.
      Religions: Comme dans la plupart des pays d'Afrique, beaucoup de Bissau-Guinéens sont animistes tout en ayant parallèlement une religion monothéiste. On peut donc dire qu'il y a 75% d'animistes, 60% de musulmans et 20% de catholiques. Tout l'Est du pays est peuplé de populations majoritairement musulmanes (Peulhs, Mandingues) et c'est aussi le cas du Sud où Nalus et Biafadas, quoique très attachés à leurs croyances traditionnelles, ont embrassé la religion islamique. Dans le reste du pays (Nord-Ouest, Bijagos et Centre) les populations sont animistes ou catholiques.

    CLIMAT & ECOSYSTEMES

    Située à mi-distance entre le tropique du Cancer et l'équateur, la Guinée-Bissau a un climat chaud et humide. La température moyenne varie peu (24° C - 29° C). Elle est soumise à une saison pluvieuse qui va de juin à novembre, et à une saison sèche qui s'étend de décembre à mai. Arrosée par la mousson atlantique (plus de 1 000 mm/an dans l'intérieur du pays au nord, plus de 2 000 mm sur la côte au sud), la Guinée-Bissau est soumise aux irrégularités pluviométriques et appartient au Comité inter-États de lutte contre la sécheresse au Sahel (CILSS).

     

    Pluviométrie et température à Bissau :
     

    Janvier

    Février

    Mars

    Avril

    Mai

    Juin

    Juillet

    Août

    Septembre

    Octobre

    Novembre

    Décembre

    Pluviométrie (en mm)

    3 3 0 0 5 38 178 356 229 74 10 5

    Température maxi (°C)

    28 29 31 30 31 32 31 30 31 32 31 29

    Température mini (°C)

    17 17 18 18 20 23 24 24 24 23 21 18

    Composition du couvert végétal et sa répartition par région administrative:
      Forêt dense sèche Forêt dense sèche dégradée Forêt dense sèche de transition Forêt claire dense Forêt claire dégradée Savane Palmeraie Mangrove Forêt ripicole TOTAL
    Bolama
    3,200
    6,400
    0
    14,000
    11,200
    44,000
    15,600
    41,600
    0
    136,000
    Biombo
    0
    0
    0
    0
    400
    8,000
    1,600
    22,400
    0
    32,400
    Cacheu
    0
    0
    0
    3,600
    31,200
    94,400
    41,200
    90,800
    400
    261,600
    Gabu
    0
    0
    0
    17,600
    268,800
    418,000
    0
    0
    64,800
    769,200
    Quínara
    23,600
    16,000
    0
    23,600
    38,800
    58,400
    5,600
    22,800
    5,600
    194,400
    Bafata
    0
    400
    8,400
    49,200
    234,000
    137,600
    6,800
    0
    8,000
    444,400
    Oio
    0
    0
    0
    69,600
    144,000
    126,800
    8,800
    10,000
    6,800
    366,000
    Tombali
    63,600
    39,600
    11,600
    12,000
    18,800
    38,800
    400
    60,800
    7,600
    253,200
    TOTAL
    90,400
    62,400
    20,000
    189,600
    747,200
    926,000
    80,000
    248,400
    93,200
    2,457,200

     

    Économie

    La Guinée-Bissau est l'un des 10 pays les plus pauvre de l'Univers ! Cette situation ne date pas d'aujourd'hui et certains facteurs tels que le SIDA ou la baisse des revenus agricoles d'exportation n'incitent pas forcément à l'optimiste. Heureusement, la vente de permis d'exploitation de pêche à l'Union Européenne ou au Japon permet de faire rentrer des sommes substantielles. En outre, la production de noix de cajou a repris son rythme de croisière (elle avait fortement diminué durant les périodes de trouble). La Guinée-Bissau est au 6ème rang mondial des producteurs de noix de cajou. La Guinée Bissau a des réserves notables de phosphates, de bauxite, d'argile, de granit et de bois. Quelques réserves off-shore de pétrole lourd pourraient être exploitées.

      Voir aussi la page agriculture

    La population est très majoritairement active dans le secteur agricole qui emploie près de 82% de la main d'oeuvre du pays. Le secteur du commerce, de l'industrie et des services attire quant à lui à peine 18% des travailleurs bissau-guinéens. La part de chaque secteur dans la composition du PIB est cependant sensiblement différente puisque l'agriculture ne contribue qu'à 62% du PIB alors que l'industrie y participe à hauteur de 12% et les services à hauteur de 26%.

    La population active de Guinée-Bissau avoisine les 500.000 personnes. C'est cette petite masse laborieuse qui doit rembourser une dette extérieure évaluée à près d'un milliard de $US. L'aide économique permettant de pouvoir supporter le poids important de la dette est seulement d'une centaine de millions de $US.

    Le développement tant attendu et qui pourrait mener le pays vers plus de propérité n'est pas au rendez-vous. Le taux de croissance de la production industrielle n'est que de 5% par an (estimation 2003). Autant dire presque rien puisque 5% de pas grand chose font toujours pas grand chose. D'autant que si la moitié de la production industrielle concerne la transformation des produits agricoles, l'autre moitié ne concerne que la bibine: production de bière et de boissons diverses...

    Pour complèter ce glorieux tableau, le commerce extérieur est largement déficitaire : les importations coûtent 60 millions de $US de plus que ce que rapportent les exportations.

      Exports : 116 millions de $US FOB en 2004 (cajou, poisson, crevettes, arachide, noix palmistes, bois) principalement à destination de l'Inde (68.9% qui achète toute la production de cajou), du Nigéria (17.5%) de l'Equateur (4.6%). Les 9% qui restent vont vers le Sénégal, le Portugal ou l'Espagne.

      Imports : 176 millions de $US FOB en 2004 (agro-alimentaire, véhicules, machines, pétrole, équipement) venant notamment du Sénégal (35.7%), de l'Italie (18.8%), du Portugal (12.8%) mais aussi de Hollande, de Chine, d'Allemagne ou de France.

    IMPORTATIONS (secteur agro-alimentaire) pour l'année 2004 (source FAO) :
      Produit de base Quantité Valeur (000 $EU) Valeur unitaire ($EU)
    1 Riz, Brisures Mt 33173 10820 326
    2 Farine de Blé Mt 14005 4208 300
    3 Bière d'Orge Mt 4992 3334 668
    4 Préparations Alimentaires Mt 2139 3310 1547
    5 Huile de Soja Mt 2465 2400 974
    6 Vin Mt 3505 2274 649
    7 Boissons non Alcooliques Mt 2940 2168 737
    8 Riz Usiné Mt 5930 1900 320
    9 Sucre Raffiné Mt 6200 1700 274
    10 Viande de Poule Mt 822 1287 1566
    11 Margarine et Grais Culin Mt 574 741 1291
    12 Lait de Vache,Entier,Sec Mt 237 741 3127
    13 Cigarettes Mt 55 729 13255
    14 Pâtisserie Mt 342 493 1442
    15 Pâte de Tomate Mt 296 364 1230
    16 Maïs Mt 1460 350 240
    17 Eaux, Glaces, etc. Mt 1325 324 245
    18 Aliments pour Enfants Mt 89 311 3494
    19 Oignons Secs Mt 1450 291 201
    20 Lait de Vache,Ecrémé,Sec Mt 90 279 3100
    F = Estimation de la FAO | M = Donnée non disponible | * = Données non officielles | Mt = Tonne métrique | P=Estimations issues des partenaires commerciaux

    EXPORTATIONS (secteur agro-alimentaire) pour l'année 2004 (source FAO)
      Produit de base Quantité Valeur (000 $EU) Valeur unitaire ($EU)
    1 Anacardes Mt 80854 61649 762
    2 Fibres de Coton Mt 176 238 1352
    3 Graines de Coton Mt 1692 238 141
    4 Boissons Alc Distillées Mt 45 150 3333
    5 Mangues Mt 32 59 1844
    6 Légumes Frais Mt 32 36 1125
    7 Huile de Palme Mt 14 14 1000
    8 Bière d'Orge Mt 11 6 545
    9 Fruits Frais Mt 2 3 1500
    10 Ananas Mt 4 2 500
    F = Estimation de la FAO | M = Donnée non disponible | * = Données non officielles | Mt = Tone métrique | P=Estimations issues des partenaires commerciaux

    Données statistiques générales :

    Taux de croissance économique réel : 2.3% (estimation 2005)
    PNB par habitant : 800 $US (estimation 2005)


    La répartion des richesses montre des très grandes inégalités. On appelle ça dans les milieux non diplomatiques "le marxisme à l'Africaine" :
    Les 10% de Bissau-Guinéens les plus pauvres détiennent 0.5% de la "richesse nationale"
    Les 10% de Bissau-Guinéens les plus riches détiennent 42.4% de la "richesse nationale"

    Taux d'inflation du panier familial : 4% (chiffre 2002)

    INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT

    Infrastructures routières (chiffres 1999) :

    - Voies bitumées en état : 453km
    - Voies non bitumées (pistes principales en latérite) : 3947km
    Total : 4400 km

    Infrastructures portuaires et fluviales :

    Les cinq grands estuaires de la Guinée-Bissau sont navigables.

    Le Rio Cacheu est navigable en eau profonde jusqu'au port de Cacheu et avec un charge de 4 000 tonnes jusqu'à Farim située pourtant à près d'une centaine de kilomètres de l'embouchure.
    Le Rio Gêba est navigable avec une charge de 120 000 tonnes jusqu'à Bissau. Les embarcations artisanales peuvent en outre remonter jusqu'à Bafatá.
    Le Rio Grande de Buba est navigable jusqu'à Buba avec une charge de 120 000 tonnes et jusqu'à l'ancien port national de Bolama avec 4000 tonnes de charge.
    Le Rio Cumbijã, au sud, est navigable jusqu'à la préfecture de Bedanda avec des petites embarcations d'une charge inférieure à 600 tonnes.
    Enfin, le Rio Cacine permet la navigation des bateaux emportant jusqu'à 3000 tonnes.

    L'ensemble des côtes bissau-guinéennes étant composé de mangrove et d'un dédale de canaux au sein même des estuaires, de nombreuses embarcations artisanales (pirogues) peuvent relier un grand nombre de villages et de villes secondaires, tant pour les activités de pêche que pour le transport de passagers et de marchandises.

    En dehors des estuaires, dans l'archipel des Bijagos, le port de Bubaque accueille des bateaux emmenant jusqu'à 120.000 tonnes de charge.

    L'ensemble des ports (Bissau, Buba, Cacheu, Farim) datent de l'époque coloniale est sont tout dans un état de délabrement avancé. Le port de Bissau, accueillant des portes-containers, ne fait pas exception. En plus des épaves de bateaux qui encombrent le vieux port, les zones de débarquement sont dans un état lamentable. La zone de stockage des containers est la seule qui montre un entretien acceptable.

    Les infrastructures aériennes :

    La Guinée-Bissau compte trois aéroports avec des pistes bitumées dont l'aéroport international Osvaldo Vieira de Bissau-Bissalanca. Les autres, au nombre de 25, sont des aérodromes avec des pistes en latérite. La majorité des ces aérodromes ne permet que l'atterissage d'avions très légers : 20 ont une longueur de piste inférieure à 914 mètres.

     

    ENERGIE

    Électricité:
    Capacité de production : 56 millions de kWh (chiffres 2003)
    Production annuelle : 52,08 millions de kWh (chiffres 2003)
    Consommation par habitant : 39 kW (chiffres 2003)

    Les normes sont les mêmes qu'en France et tout fonctionne sur du 220 volts quand il y a du courant ce qui peut se révèler rare. Les prises sont également les mêmes qu'en France. Il faut savoir qu'il y a deux réseaux électriques à Bissau : un pour les nantis et les entreprises qui est assez souvent coupé, et un pour les Bissau-Guinéens chanceux (encore plus souvent coupé). Le Bissalien moyen ou pauvre devra se contenter de la bougie ou de la lampe à pétrole.

    Aujourd'hui, la situation est particulièrement préoccupante. Seule Bissau possède une centrale électrique. La compagnie nationale d'électricité n'a souvent plus d'argent pour payer le pétrole nécessaire à sa production. Des fils électriques "pirates" sortent de tous les côtés de la centrale pour alimenter quelques chanceux, notamment dans le quartier de Chão de Papel où le générateur est installé. La centrale arrive cependant à alimenter la capitale et ses environs toutes les nuits à partir de 18H00 et ce jusqu'au lendemain midi. Certains jours on peut même avoir du courant 24h/24. Ceci est néanmoins exceptionnel.

    En dehors de la capitale, seules les villes principales telles que Cacine, Catió, Cacheu, Bissorã, Gabú ou Bafatá ont des centrales alimentant les commerces, les administrations et quelques foyers. Elle ne fonctionnent cependant qu'en soirée jusqu'à minuit-1h du matin.
    Les localités de taille plus modeste doivent quant à elles s'en remettre à quelques initiatives privées ou personnelles : de petites groupes électrogènes peuvent par exemple être amortis par les commerçant qui les possèdent pour leur frigo en "revendant" quelques centaines de watts dans le quartier pour alimenter une ampoule, une télévision ou un ventilateur. C'est par exemple le cas de Bubaque dans les Bijagos.

    Si aujourd'hui, 100% de la petite production électrique bissau-guinéenne est d'origine thermique, des projets comme celui du barrage hydroélectrique de Saltinho sur le Rio Corubal pourraient augmenter à terme la production électrique du pays de plus de 120%. Le projet prévoir que d'ici 2015, le barrage de Saltinho pourrait couvrir près de 60% des besoins électriques du pays. Un tel ouvrage ferait économiser en quelques années des centaines de millions de tonnes de pétrole au pays tout en le rendant plus autonome et moins pollué.

    Pétrole :
    Toutes utilisations confondues, la Guinée-Bissau consommait en 2003 (derniers chiffres disponibles) 2450 barils de pétrole par jour. L'ensemble de cette consommation est importée. En effet, la Guinée-Bissau aurait, selon certains experts, du pétrole off-shore sur son territoire (dont une partie est disputée avec le Sénégal), mais ce pétrole, trop lourd pour avoir une qualité acceptable, n'est pas exploité à ce jour.

    L'industrie étant quasi-inexistante, la consommation de pétrole est répartie entre l'utilisation comme carburant automobile et la production d'électricité.

    MEDIAS/PRESSE

    La presse bissau-guinéenne, y compris les ondes, a été libéralisée depuis la loi du 3 octobre 1993. La presse écrite comporte outre le journal gouvernemental Nò Pintcha, ouvert à l’opposition, des titres indépendants comme L’Expresso Bissau, Corréo da Guinée-Bissau, Banoméro. D’autres sont directement liés aux partis politiques : Bagueira pour le PCD, Ganga Real pour la RGB-MB, qui sont souvent très critiques à l’égard du pouvoir. Sur le plan radiophonique, la radiodiffusion nationale (RDN) est concurrencée par trois radios privées : Radio Pidjiguiti, Radio Mavegro, Radio Sintchan Hocko et Radio Bombolom, qui, tombée entre les mains des mutins en 1998 leur a servi de tribune tout au long du conflit.

    Plusieurs radios internationales se disputent également la bande FM à Bissau. On a pu noter la concurrence entre Radio France Internationale (RFI) et la radio portugaise (RTPI) dans ce pays lusophone, mais où le français prend une importance croissante. De même, la télévision nationale (RTGB) est concurrencée par des chaînes extérieures. On retrouve la même concurrence franco-portugaise relayée par TV5 et la chaîne de télévision portugaise équivalente (RTP). La presse dispose d’une relative liberté depuis le rétablissement des institutions en 2005 et il existe un conseil national de la communication sociale.

    TELECOMMUNICATIONS / INTERNET

    Il est désormais possible d'aller sur internet en Guinée-Bissau. Depuis 2000, le nombre de cybercafés ne cesse d'augmenter même si la qualité générale de ces établissements est loin d'être excellente. Dans tous les cas, seule la capitale est réellement équipée de connexions internet publiques. Le nombre total d'utilisateurs d'internet en Guinée-Bissau en 2006 est estimé à 30.000 dont la plupart sont des utilisateurs occasionnels, souvent jeunes.
    Ne comptez pas vous connecter au net ailleurs que dans la capitale. A titre indicatif, le code internet du pays est curieusement ".gw". (voir aussi le paragraphe "
    internet" dans la page "PRATIQUE"). 

    Le téléphone coûte très cher sur l'international et le cellulaire dont l'offre grand public est très récente n'a pas encore touché toutes les couches de la population. Les dernières statistiques concernant le nombre de téléphones GSM en circulation datant de 2003, il est fort probable qu'aujourd'hui en 2006, le nombre de GSM dépasse le nombre de lignes fixes.

    - Nombres de lignes téléphoniques : 10600 (chiffres 2003)
    - Nombre de téléphones mobiles GSM : 1300 (chiffres 2003 : ce nombre a considérablement augmenté)
    - Densité de téléphones  fixes :  7 téléphones/1000 habitants
    - Indicatif international de la Guinée-Bissau : +245

    NB : En dehors de Bissau, le nombre de lignes fixes dans les ville bissau-guinéennes ne dépasse jamais quelques dizaines.




    2 commentaires
  • L’Afrique face à la crise mondiale : mieux articuler les politiques de développement Convertir en PDF Version imprimable Suggérer par mail
    27-11-2008
    La récente crise politique kényane  est riche d’enseignements. En effet, les deux branches de l’alternative en sont singulièrement problématiques.  Raila Odinga devrait-il jeter ses militants dans la rue pour restaurer la démocratie au risque de sacrifier des milliers de vies ou devrait-il, au contraire, opter pour un règlement pacifique, quitte à hypothéquer la victoire qu’il était sûr d’avoir remportée.Image

    En réalité, il s’agit là d’une véritable quadrature du cercle, puisque même la solution négociée (gouvernement d’union nationale) constitue une atteinte à la souveraineté du peuple. Un tel dilemme symbolise, me semble-t-il, la situation à laquelle l’Afrique d’aujourd’hui doit faire face. A moins que l’on ne se résolve, comme Proudhon, à laisser faire l’horloge biologique à l’œuvre dans toute société humaine et dont émanera le triomphe d’un Etat de justice absolu sans la moindre révolution.


    Plus qu’une révolution dans le sens classique du terme, c’est un éveil spirituel que les populations africaines ont besoin. Ce travail de longue haleine prendra nécessairement ses racines, non pas seulement dans le terreau impersonnel des lois et de la production, mais également au niveau de l’intimité familiale. Cette sphère de la reproduction dans laquelle le discours convainc sans coercition. Car la faim de l’Afrique n’est pas que physique. Elle est aussi morale et intellectuelle, d’où le rôle de premier plan assigné à la femme et à l’éducation. En se référant à ces pistes théoriques, on peut tenter de dégager quelques impératifs absolus qui se posent à notre continent sur la route de l’émergence.

    Afrique, mere amere
    L’Afrique c’est connu, est malade de ses gouvernants. Elle est devenue une mère amère sollicitée de tous bords par ses enfants égarés et sa Justice aux abois. Quelle mère donc donnerait à son fils un serpent si ce dernier réclame du pain ? Si on assiste à de fréquents soulèvements, réprimés pour la plupart, c’est que le père, autrement dit le paradigme dirigeant, est atteint de presbytie et a pris ses enfants pour des rats affamés qui lui rongeraient les pieds. Repus d’avoir avalé la part des ses fils, il s’est endormi, a roulé sur eux et s’est mis à les étouffer.


    Telle est l’image que laissent les pouvoirs despotiques retranchés derrière les forces de défense publiques.
    Je voudrais rappeler à tous ces policiers, qui «casse du manifestant» au nom de l’ordre public, que l’article 12 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, figurant dans la Constitution de tous les pays, stipule que «la garantie des droits de l’Homme et du Citoyen nécessite une force publique» et que  «cette force est donc instituée pour l’avantage de tous et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée».


    Aux donneurs d’ordre, il convient d’indiquer que la formule de l’-Odering dum metuant (qu’ils me haïssent pourvu qu’ils me craignent) est également le mot d’ordre de tous les terroristes.
    Même si nous devons exercer notre jugement en fonction de critères complexes, l’on peut avancer, sans trop de risques, que la solution à la cherté de la vie qui jette les populations dans la rue passera, nécessairement,  par un ensemble de mesures hardies.


    Les peuples africains se caractérisent par leur sens aigu du sacrifice. Au Sénégal, une réduction de la taille et des avantages des structures étatiques constituerait un premier signal fort. Par structures étatiques, j’entends les agences et directions dont le véritable rôle est de servir de carpe diem à une clientèle politique affairiste. Cela supposerait, au demeurant, que les pouvoirs aient le courage de leurs responsabilités. Il s’agirait d’abord de défier un certain establishment jaloux de ses privilèges, de traiter les lobbys politiques et religieux (véritable aggiornamento version islamique) avec la respectueuse distance républicaine que requiert le bon fonctionnement d’un Etat de droit. Cette distance ne devient respectueuse que si les autorités observent une scrupuleuse équité dans leur bonne intelligence avec les communautés. Il va sans dire que le naturel substrat à l’Etat de droit est le patriotisme de ses citoyens.

    Individualisme versus patriotisme
    Pour mener des politiques qu’ils savent impopulaires, la plupart des gouvernements préfèrent les présenter comme des «contraintes» extérieures -sur lesquelles ils n’ont aucune prise- et non pas comme des décisions nationales. On dira que «c’est la faute du Fmi» ou que «c’est la faute de Bruxelles» ou encore «maintenir les prix en l’état actuel relève du miracle au regard de la hausse du coût du baril de pétrole». Or au Sénégal, longtemps après la baisse vertigineuse du prix du baril, celui de l’essence n’a pas connu d’évolution significative. En la matière, l’Etat semble se laisser aller à la facilité du jus utendi et abutendi (droit d’user et d’abuser).
    En Afrique, les contingences extra muros sont systématiquement convoquées dès qu’il y a flambée des prix de certains produits importés. Désormais, elles (ces contingences)  semblent dispenser les gouvernants dilettantistes de toute vision prospective de développement.


    Pour se ménager un dernier bouclier, on s’invente une petite paranoïa téléguidée. Les régimes aux abois évoqueront derrière chaque mouvement d’humeur la responsabilité de «forces tapies dans l’ombre», lesquelles ne sont, en réalité, que la manifestation grouillante de leurs propres insuffisances…
    La substitution de l’intérêt collectif par l’ambition individuelle est à la base des deux principales tares qui rongent l’Afrique.


    D’une part, nous avons la corruption, la gabegie et le népotisme, de l’autre, l’irrédentisme les guerres ethniques et les régimes totalitaristes. Les premiers maux vérifiables au plan individuel favorisent l’occurrence des seconds dont les enjeux dépassent le cadre restreint des appétits personnels… la population européenne qui connaît déjà l’Afrique voit souvent d’un mauvais œil que l’Union européenne puisse consacrer autant de ressources à aider des pays dans lesquels colloques et discours se substituent aux actes concrets. A ce sujet, une anecdote rapporte que le Bénin vient régulièrement se ravitailler en conclusions de séminaires au Sénégal pour faire l’économie de dépenses inutiles. Il est reproché aux Sénégalais, par exemple, de ne significativement investir que dans des domaines certes à moindres risques, mais dont la portée en termes d’emplois est plus que douteuse (commerce et immobilier).


    Au demeurant, un tel choix traduit la mise en avant de l’intérêt individuel en lieu et place de projets de grande envergure. Autant on ne peut tout attendre des partenaires extérieurs, autant il serait illusoire et à la limite dangereux de prétendre à une assistance totale et continuelle de l’Etat. Le moins d’Etat mieux d’Etat a longtemps été agité comme formule miracle. Elle n’est, cependant, pertinente que sous-tendue par un environnement socioéconomique propice dans lequel des éléments modérateurs, tels que la société civile et la classe moyenne, joueraient pleinement leur rôle.

    Role de la classe moyenne et de la societe civile
    La classe moyenne (secteur informel et fonctionnaires moyens) est à l’économie ce que la société civile est à la démocratie. Respectée et douée de pouvoir d’achat, elle assure consistance et vitalité à l’épargne publique. De même, la société civile, électron libre dans l’univers des idéologies, remplit aisément son rôle de tampon social.
    Spinoza et, dans une certaine mesure, Machiavel avaient développé l’idée d’un recours à un ensemble d’organismes contre-pouvoir, convaincus que «la raison était souvent désarmée face à la passion. Il fallait donc, à leurs yeux, que le salut de l’Etat ne dépendît pas exclusivement de la vertu de ceux qui gouvernent».
    Le pouvoir aura, d’abord, à cœur de transférer les fonds économisés dans la réduction de son train de vie, vers une aide substantielle au secteur informel (Etat généraux, formation continue des acteurs, prêts à intérêts préférentiels, infrastructures de base…). Il faudrait, ensuite, revaloriser de manière significative le traitement salarial des agents de la Fonction publique appartenant à la classe moyenne, au lieu d’exacerber les écarts entre hiérarchie, ce qui équivaudrait à ankyloser l’épargne et la consommation en offrant plus de possibilités à une élite qui s’empresserait d’expatrier sa fortune. Doter une majorité de fonctionnaires de revenus raisonnables équivaudrait à donner un coup de fouet à la consommation des ménages ainsi qu’à l’épargne publique. Ce qui, à terme, relancerait de manière durable une économie poussive. Il est, en effet, de notoriété publique que la consommation des ménages ainsi que l’épargne de la classe moyenne sont les véritables leviers de toute économie.


    Il conviendrait, enfin, de faire de la société civile un interlocutrice, une sorte de sparring  partner propre à anticiper positivement les humeurs de la population en lieu et place de la diabolisation systématique et du face-à-face en chiens de faïence auxquels on assiste généralement.
    Cette contribution est longue, car l’enjeu en vaut  la chandelle. Elle se veut conforme au jour sans pain, au jour de jeûne sans espoir de rupture,  au temps qui, entre la promesse électorale et le moment de sa réalisation, se contorsionne et s’étire, aux yeux du Sénégalais, de l’Africain qui habite du côté de la terre où le soleil ne brille jamais.


    Paul NDOUR
    Professeur au Lycée Limamoulaye
    Enseignant vacataire au Dpt de Langues romanes à l’Ucad  
    en Langues étrangères
    appliquées à l’Univ. de Thiès  
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  • Mercredi 11 février 2009

     Depuis Septembre 2008, le monde est en proie à une crise financière qui a éclipsé les deux précédentes crises alimentaire et pétrolière. Selon la Banque mondiale, la projection de croissance du PIB dans les économies en développement pour 2009 sera probablement de 4,5% au lieu de 6.4% prévu précédemment. Cela démontre la possibilité de contagion de la crise en cours. La capacité l'économie africaine à en absorber les effets est loin d'être évidente. Comment le continent sera-t-il affecté par la crise et comment pourrait-il s’en sortir ?

    Il y aura à la fois des effets directs et indirects : les premiers seront minimes, tandis que les seconds seront colossaux. L'économie locale sera directement affectée en fonction du niveau du capital provenant de l'étranger. D’ailleurs des fuites de capitaux ont déjà été signalées dans certains marchés émergents et des introductions en bourse (IPO) de l’ordre de 30 milliards dollars y ont été annulées en 2008. Cette tendance est déjà perceptible sur les marchés des capitaux africains. Par exemple, au début du mois de Décembre 2008, le principal indice boursier (ASI) au Nigéria avait chuté de moitié en passant de 66.271 à moins de 33.025, correspondant respectivement à 89.2 et à 50.3 milliards de dollars de capitalisation boursière. Bien que cette chute libre de l'ASI soit antérieure à la crise, celle-ci a encore accentué la perte de confiance, ce qui a conduit de nombreux investisseurs à quitter le marché des capitaux même à perte.

    L’économie africaine étant relativement monolithique et largement tributaire de l'extraction de ressources naturelles, elle souffrira sans doute de la crise. Les prix des ressources naturelles sont en diminution en raison d’une demande décroissante. Les prix du pétrole, par exemple, sont passés en dessous de 40$ et continuent à baisser. Sur le marché du platine, Lonmin Plc, un acteur majeur en Afrique, a mis en garde contre de possibles licenciements de personnel en raison de baisse de la demande et des prix du métal. AngloGold Ashanti (troisième plus grand producteur d'or dans le monde, basé en Afrique du Sud) a prévu de renoncer à certains de ses projets. Ainsi, il révisera ses investissements de 400 millions de dollars cette année. Tout cela créera un effet domino à travers l'ensemble du continent.

    A mesure que les pays développés entrent en récession, les prêts et les subventions, constituant une importante partie des budgets de développement national, vont baisser. De même, il y aura une baisse des transferts des expatriés qui, au fil des ans, sont devenus une source importante de recettes en devises pour les pays africains. Les recettes du tourisme chuteront également. Plusieurs pays africains connaissent des déséquilibres macroéconomiques. Cela soulève des craintes palpables que cette crise se termine par une tragédie humaine. On estime à 100 millions le nombre de personnes qui ont été poussés dans l’extrême pauvreté par les prix élevés des produits alimentaires et du pétrole. D’autres personnes viendront gonfler ce nombre à mesure que les taux de croissance déclineront.

    L'inquiétude concernant la sécurité des réserves africaines à l’étranger est légitime en gardant à l'esprit que ces réserves sont domiciliées dans des banques qui ont fait faillite.
    Entre le 10 Septembre et le 1 Octobre 2008, le Nigéria a perdu environ 1.5 milliard $ puisque ses réserves sont passées de 63.5 milliards $ à 61.99 milliards $. Récemment, elles ont baissé pour atteindre 55.254 milliards $ et il n'y a aucun signe que cette dégringolade cessera bientôt. Quant à la monnaie nationale (naira), elle a poursuivi sa chute libre sur le marché des changes.

    Les problèmes de croissance en Afrique étant presque insolubles, ils se compliqueront davantage si la réponse des dirigeants à la crise financière mondiale reste tiède. La première chose à l'ordre du jour est l'amélioration de l'environnement réglementaire, en particulier la régulation monétaire. À cet égard, L’Etat en Afrique devrait en finir avec les politiques restrictives et créer un environnement favorable à l'entrepreneuriat. Un nombre important d'entreprises en Afrique sont informelles. Elles ont été contraintes de le devenir à cause de procédures administratives frustrantes. Les encourager à passer à la formalité en éliminant les barrières à l'entrée favorisera leur développement.

    L'intervention directe l’Etat pourrait créer de plus grands problèmes à long terme. A titre d’exemple, la tendance à la baisse sur le marché des capitaux au Nigéria s’aggrave en dépit des interventions répétées de la Banque centrale. Le volume des transactions a chuté en passant de 69 à 18.6 millions $. Par ailleurs, les Etats ne sont pas toujours performants en matière d’allocation des ressources. Très souvent, la répartition des revenus est fondée sur la corruption, et autres critères peu pertinents. L'économie se développe quand des entrepreneurs novateurs répondent aux signaux du marché. Les Etats feraient mieux de supprimer les taxes et réglementations, prohibitives et excessives, qui faussent ces signaux.

    L’Afrique dispose de nombreuses ressources inexploitées et de terres arables pour étendre ses exportations de base. Ce dont a besoin le continent, ce sont des règles claires favorables aux entreprises qui à leur tour permettront l’épanouissement des compétences entrepreneuriales innées africaines.

    Olusegun Sotola est chercheur à l'Initiative pour l'Analyse des Politiques Publiques, un think-tank de politique publique basé à Lagos, au Nigéria. Cet article a paru dans une version plus longue sur africanexecutive.com

    Publié en collaboration avec UnMondeLibre.org


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